Propositions musicales, propositions automnales
Temps gris tant pis! Avec le froid qui s’infiltre et serpente, rien de tel qu’un peu de musique pour réchauffer l’âme. J’ai envie de vous partager quelques pianistes incandescents qui font basculer, l’instant d’un moment, les premiers souffles de l’automne en ultimes saluts de l’été. Tous ces pianistes sont facilement trouvables sur YouTube ou toute autre plateforme de diffusion continue.
Dinu Lipatti – Schubert, Impromptu op. 90 no. 3
https://youtu.be/bFTDGJ-NJ6E?si=L-ynJJLfT2FhlKAh
Un de mes interprètes préférés présentant une de mes pièces coup de cœur. Cet impromptu de Schubert exige du pianiste une capacité de faire chanter le piano, ce béhémoth rigide. Lipatti, lors de son ultime concert à Besançon en 1950 conjure sous ses doigts l’attitude solennelle remplie de révérence que l’on doit à la vie. Un touchant témoignage d’un pianiste qui nous a quitté beaucoup trop tôt.
Evelyne Crochet – Bach, Variations Goldberg BWV 988
https://youtu.be/9IHuRKIebmw?si=GLIV_Ww_ynUe1d8N
Si Bach est un architecte derrière les plus somptueuses cathédrales musicales, Crochet quant à elle les habite et transforme les lieux en demeures. C’est à l’interstice de la science et de l’art que les variations Goldberg sont profondément ancrées. Crochet, elle, comme l’alchimiste qui transforme le plomb en or, sublime la structure parfaite du compositeur en offrande pancaliste.
Alfred Cortot – Chopin, Nocturne op. 55 no. 1
https://youtu.be/JrIgCFsr1Xs?si=FxaFvkE4lJzAXc0l
On disait autrefois des mains de Cortot qu’elles étaient la réincarnation de Chopin lui-même. Signe des temps qui changent, les enregistrements parfois ponctués de mauvaises notes ou encore d’une technique parfois inégale, ne seraient sans doute pas accueillis avec la même ferveur. Cela dit, Cortot réussit là où plusieurs se fracassent contre les murs de l’échec; il raconte l’histoire de la musique et nous fait vibrer.
Yvonne Lefébure – Ravel, Jeux d’eau
https://youtu.be/iB4JtY-bPzI?si=CPnEsB7nUusYZ0je
Ravel, l’éternel académicien, orfèvre hors pair qui exploite les recoins des instruments pour les faire miroiter sous une nouvelle lumière, propose dans Jeux d’eau un piano qui éclabousse, clapote, scintille et qui se fraie un chemin dans un torrent exubérant. Lefébure, prodige du piano, aurait elle-même proposé à Ravel comment noter sur la partition certains effets pianistiques. Possédant une virtuosité renversante, elle permet à l’instrument de chanter d’une nouvelle manière, de se présenter sous un nouveau jour.
Mitsuko Uchida – Mozart, Sonate no. 14 en Do mineur
https://youtu.be/hKHfRV19hw8?si=gcjPyzPaSkitW5QA
Pierre Bayard publie en 2009 Le plagiat par anticipation, livre présentant l’idée pince-sans-rire qui dit qu’on peut copier les œuvres qui n’existent pas encore. Mozart avec sa sonate en do mineur annonce, à mon avis, Beethoven et l’avènement du romantisme. Uchida possède la capacité de devenir translucide et laisse ainsi toute la place à la musique, délivrée de tout artifice provenant de l’égo. La pièce évoque les feuilles d’automne sous l’influence des bourrasques. Des derniers vents chauds qui nous surprennent quelques minutes en après-midi.
0 commentaires